Cette analyse fait partie du cahier Recherche de candidats.fr, à l'occasion de la campagne présidentielle 2012.


Définition du libre accès aux publications scientifiques

Le libre accès sous-entend la mise à disposition en ligne de contenus numériques. Ces contenus peuvent être sous licences libres (Creative commons BY SA3...) ou sous licences non-libres mais permettant certaines formes de redistribution, comme la Creative Commons BY NC ND4. Ces licences s'appuient sur l'existence du droit d'auteur sur les contenus numériques.

S'agissant des publications scientifiques, différentes expressions du libre accès sont observées :

  • Des site web d'archives, tels que ArXiv5 ou HAL (Hyper articles en ligne)6, utilisés notamment par l'Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA)7 ou l'Université Pierre et Marie Curie (UPMC)8, permettent aux chercheurs de mettre à disposition leurs articles lorsque le contrat passé avec l'éditeur le permet. Cette pratique est couramment appelée « la voie verte ».

  • Les revues dites en "accès ouvert" mettent à disposition du public les articles soumis par les chercheurs sans délai. C'est la "voie dorée". Généralement, ces revues imposent des frais de publications élevés aux chercheurs soumettant leurs papiers. Le DOAJ (Directory of Open Access Journal) recense plus de 7 000 journaux de ce type9. Certaines revues10 suivent ce modèle tout en ayant un coût nul, à la fois pour les auteurs (pas de frais de publication) et les lecteurs (pas de frais d'accès), et en s'appuyant sur ArXiV pour la conservation et la mise à disposition des articles eux-mêmes.

Enjeux du libre accès de la recherche

Les enjeux du libre accès des publications scientifiques sont multiples :

  • C'est l'assurance d'un large rayonnement de la recherche auprès de toutes les universités dans le monde, mais aussi auprès des acteurs économiques innovants.

  • Le libre accès garantit la pérennité des travaux qui ont été investis.

  • Le libre accès permet une diffusion plus large et plus rapide des travaux (y compris auprès des pays les plus pauvres), à l'origine de l'essor prodigieux de la recherche depuis la Renaissance (on ne change pas un modèle qui marche !)

  • C'est un outil pédagogique nécessaire dans les universités et les grandes écoles, afin de former des personnes aux domaines de pointe rencontrés dans la recherche fondamentale et appliquée.

Dépendance actuelle des universités et des unités de recherche

Malgré les enjeux essentiels du libre accès aux publications scientifiques, l'information dans ce domaine est actuellement détenue par quelques éditeurs en situation d'oligopole. L'accès à l'information scientifique étant nécessaire à toute recherche, les bibliothèques universitaires et unités de recherche ne peuvent s'en passer et sont dépendantes de ces éditeurs. Ceux-ci profitent de cette situation pour fixer des contrats de fourniture de revues scientifiques de plus en plus coûteux.

En conséquence, en juin 2010, sous la pression de l'éditeur Elsevier, l'Université Pierre et Marie Curie (UPMC) a mis fin à son abonnement déplorant être « bloquée » en raison de « contrats très contraignants » et d'« interlocuteurs peu ouverts au dialogue » Elle déplore ainsi que « l'éditeur scientifique souvent fait place au financier », et agit avec les établissements de telle manière à « retirer un maximum d'argent »11.

Une grande partie des éditeurs, tels que Springer12, demande un « transfert de copyright » aux auteurs. Même si cette pratique est en déclin13, elle reste un danger d'enfermement et de monopolisation du savoir. En parallèle, un nombre croissant de ces revues propose la publication en Open Access, mais avec des coûts élevés, entraînant une discrimination des équipes de recherche en France et dans le monde.

Il faut enfin souligner que, la majorité des chercheurs en France travaillant dans le secteur public, l'État finance in fine deux fois les publications de ses chercheurs : une fois via le salaire et une fois via les frais d'abonnement aux revues ou d'accès aux actes de conférence.

Archives ouvertes

Afin de s'affranchir de l'emprise des éditeurs sur la connaissance scientifique, les archives institutionnelles ouvertes sont apparues telles que ArXiv ou HAL. L'absence d'obligation des chercheurs à déposer leurs articles dans ces dépôts ne permet qu'à une faible proportion de s'y retrouver. Des universités comme Stanford, le MIT ou Princeton14 ont adopté le dépôt automatique de toutes les publications lorsque l'accord avec l'éditeur le permet (par exemple lorsqu'il n'y a pas cession exclusive des droits à l'éditeur). Ce dépôt devrait être rendu obligatoire.

1Avis du COMETS sur « les relations entre chercheurs et maisons d’édition scientifique » http://www.cnrs.fr/fr/organisme/ethique/comets/docs/avis_Relations-chercheurs-maisons-edition.pdf

10La revue LMCS : http://www.lmcs-online.org, the Journal of Artificial Intelligence Research, The Electronic Journal of Combinatorics ou encore Theory of Computing