Cette analyse fait partie du cahier brevetabilité de candidats.fr, à l'occasion de la campagne présidentielle 2012.

L'échec annoncé de la proposition

La proposition de règlement est décevante au regard de l'enjeu majeur que représente l'élaboration d'un système de brevets qui puisse tenir ses promesses de favoriser efficacement l'innovation en Europe. Le règlement proposé ne crée pas de brevet de l'UE. Il ne fait qu'utiliser le brevet traditionnellement délivré par l'OEB en lui ajoutant un attribut unitaire sans pourtant que l'UE ne soit partie à un accord instituant une juridiction unifiée des brevets.

La proposition n'est pas conforme aux traités de l'UE d'après la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE)2 :

« l’accord envisagé [...] priverait les juridictions des États membres de leurs compétences concernant l’interprétation et l’application du droit de l’Union ainsi que la Cour de la sienne pour répondre, à titre préjudiciel, aux questions posées par lesdites juridictions et, de ce fait, dénaturerait les compétences que les traités confèrent aux institutions de l’Union et aux États membres qui sont essentielles à la préservation de la nature même du droit de l’Union. »

La Commission a été forcée à revoir sa copie mais la base juridique demeure encore bancale3. En conséquence, l'accord entériné par la commission des affaires juridiques du Parlement européen le 20 décembre 20114 pose de sérieuses questions de sécurité juridique, car il pourrait être annulé par la CJUE par la suite.

Propositions pour un brevet unitaire de l'UE

Quelle que soit la juridiction des brevets mise en place, ses décisions doivent nécessairement être contrôlées par un tribunal indépendant et impartial, la CJUE, à même de trancher dans le respect du principe de proportionnalité les conflits entre le droit des brevets et d'autres domaines du droit (concurrence, libertés fondamentales ...).

L'UE doit avoir la mainmise sur la matière des brevets. Pour cela, un véritable brevet de l'UE doit être créé. Les bases juridiques du brevet unitaire ne doivent reposer exclusivement sur la Convention sur le brevet européen et cet accord international doit être incorporé au droit de l'UE, l'OEB n'ayant qu'une délégation de pouvoirs de l'UE.

L'UE doit également s'assurer d'avoir tout pouvoir de décision sur le détermination du champ de la brevetabilité par une clarification des dispositions de la CBE. Une législation distincte ou une modification des dispositions doit insister sur l'exclusion de tout logiciel du champ de la brevetabilité.

1Plus d'informations sur le projet de règlement sur le brevet unitaire : http://www.brevet-unitaire.eu/fr/content/home.

3Plus d'informations sur la base juridique de la proposition de règlement : http://www.brevet-unitaire.eu/fr/content/base-juridique-du-brevet-unitaire%C2%A0-ne-pas-jouer-avec-le-feu%C2%A0.