Cahiers 2012 › Accessibilité › Accessibilité et droit d'auteur
Le mardi 6 mars 2012, 17:01 - Lien permanent
Pour permettre à toute personne d'accéder à des contenus, il peut être nécessaire d'y adjoindre une adaptation : transcription braille, sous-titrage, etc. Or, ces pratiques sont considérées comme des modifications de l’œuvre et s'opposent au droit d'auteur. Le droit d'auteur vient donc s'opposer à l'obligation d'accessibilité des documents publics prévue par la loi du 11 février 2005. Elle contraint des associations à privilégier un aspect de la loi en se plaçant en illégalité par rapport à d'autres dispositions. Ce paradoxe pourrait être dépassé par une adaptation de la législation.
Cette analyse fait partie du cahier Accessibilité de candidats.fr, à l'occasion de la campagne présidentielle 2012.
L'article 47 de la loi 2005-102 du 11 février 20051 impose au secteur public de rendre leur communication en ligne accessible aux personnes handicapées. Or, il existe aujourd'hui un conflit entre cette obligation d'accessibilité d'une part, renforcée par l'article 225-2 du Code pénal2 définissant la discrimination lorsque est refusée la fourniture d'un bien ou d'un service, et le droit d'auteur d'autre part, qui interdit la modification d'une œuvre protégée en dehors de l'exception au droit d'auteur en faveur des personnes handicapées3 qui indique que seuls des organismes « habilités conjointement par le ministre chargé de la culture et le ministre chargé des personnes handicapées » peuvent faire des transcriptions, et seulement « en vue d'une consultation strictement personnelle par les personnes atteintes d'un handicap ».
La mise en accessibilité de contenus web suppose de modifier le code source, lui-même propriété de la société qui a développé le site en dehors de dispositions contractuelles contraires4, de modifier éventuellement les contrastes de couleurs, propriété du graphiste, de transcrire – et sous-titrer pour les vidéos – les médias sonores... Or, il est matériellement impossible de demander à un nombre restreint d'organismes agréés, qui ne seraient sans doute pas compétents pour traiter la question du code, de faire ces modifications.
Ainsi, un propriétaire de site web qui aurait la volonté de rendre ses contenus accessibles se trouverait confronté à une insécurité juridique puisque tiraillé entre son obligation de mise en accessibilité, et son interdiction de modifier un contenu dont il n'a pas les droits pour le rendre accessible.
1L'article 47 de la loi 2005-102 du 11 février 2005 imposant au secteur public de rendre leur communication en ligne accessible aux personnes handicapées http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000809647.
2Article 225-2 du Code pénal définissant la discrimination lorsque est refusée la fourniture d'un bien ou d'un service http://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=36240772BE31A5E09D753A3E8D0D341A.tpdjo06v_3?idArticle=LEGIARTI000006417835&cidTexte=LEGITEXT000006070719&dateTexte=20110916&categorieLien=id.
3Exception au droit d'auteur pour l'accessibilité des œuvres http://www.exception.handicap.culture.gouv.fr/.
4Voir le jugement du 10 novembre 2011 du Tribunal de grande instance de Paris, 3e chambre, 4e section sur le site Legalis.net http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=3277La